PEPITES – Programme Essonnien de Prévention de l’Initiation au Tabac par l’Education en milieu Scolaire

Entre 2014 et 2018, la Fondation JDB a mis en œuvre le programme PEPITES de prévention du tabac au sein de collèges du département de l’Essonne, dans le cadre d’un partenariat très étroit avec l’éducation nationale au niveau du département. 744 élèves ont ainsi participé à deux ateliers par an pendant leurs quatre années de collèges, ateliers fondés sur le jeu et l’échange autour des comportements, des compétences psycho-sociales, du développement des connaissances en lien avec le tabac. La mesure du goût a été par ailleurs utilisée pour générer des réflexions autour des impacts sur la santé de la consommation de tabac. PEPITES a fait l’objet d’une méthodologie d’essai randomisé en cluster qui a pu démontrer les effets positifs des activités mises en œuvre sur l’initiation au tabac des jeunes participants. Le projet présente ainsi des modes de travail concernant la mise en œuvre d’une évaluation scientifique des actions de prévention en milieu scolaire.

06/12/2022

Prieur Isabelle
Infirmière conseillère technique auprès du Directeur académique de l’Essonne

Vieira Stéphanie
Chargée de projet

Sancho-Garnier Hélène
Professeur de santé publique, membre du Conseil d’administration de la Fondation JDB lors de la mise en œuvre du programme PEPITES

Présentation de l’intervention

La Fondation JDB

Reconnue d’utilité publique depuis 2009, la Fondation JDB (Judlin De Bouville) pour la prévention cancer[1] a été fondée par la Ligue Nationale contre le Cancer et son comité de l’Essonne. Comme son nom l’indique, elle a pour vocation de contribuer à la prévention des cancers via différentes activités : l’Espace Prévention Santé Antéïa, qui comprend plusieurs salles d’activités (plus de 1 000 m2), la mise en œuvre de programmes de prévention et d’éducation pour la santé en milieu scolaire,  la formation de professionnels (sous la forme d’un diplôme universitaire), l’organisation d’évènements ludiques et le développement de recherches-actions, comme le projet PEPITES. Le conseil d’administration de la fondation accompagne sur ces différents projets l’équipe salariée, composée de 7 personnes.

La volonté de mettre en œuvre des actions avec une évaluation solide

Le projet PEPITES s’inscrit dans la volonté du Conseil d’administration de la Fondation JDB et de sa présidente de l’époque, le Pr Sancho-Garnier, de mettre en œuvre des projets accompagnés par une évaluation scientifique, s’appuyant sur une méthodologie d’essai randomisé en cluster, comparant un groupe témoin et un groupe d’intervention.

« Durant les quatre années de mon mandat, j’ai essayé de mettre en place des actions avec une évaluation scientifique.  en particulier basée sur une méthodologie d’essai randomisé permettant des conclusions crédibles et extrapolables.

Pr. Hélène Sancho-Garnier, Présidente de la Fondation JDB au moment du projet

Le projet s’est appuyé, au départ, sur l’enquête HBSC[2] qui montrait une tendance à la hausse des consommations de tabac chez les collégiens d’Ile-de-France. Cette réflexion s’inscrivait également dans les axes du Programme national de réduction du tabagisme 2014-2019, qui rappelaient que 80% des fumeurs commençaient à fumer avant leur majorité et que la dépendance s’installait rapidement après le début de la consommation et d’autant plus que celle-ci était précoce. A l’époque, la première cigarette était en moyenne fumée à 14 ans et, en 2011, 23% des jeunes de 16 ans étaient des fumeurs quotidiens.

Objectifs

Au regard de ces constats, la Fondation JDB a lancé une réflexion sur le type de projet à mener pour tenter de diminuer l’entrée dans le tabagisme des collégiens.

Une analyse de la littérature scientifique réalisée en 2013 et la connaissance d’expériences dans d’autres pays, notamment au Canada, ont permis à l’équipe de définir les principes d’intervention suivants :

  • Travailler en étroite collaboration avec les différents acteurs de l’éducation nationale, au niveau du rectorat comme au sein de chaque établissement,
  • Elaborer un parcours de prévention qui s’appuie sur des rencontres régulières avec les mêmes jeunes (deux fois par an pendant les 4 années de collège), pour éviter l’écueil de l’intervention de prévention ponctuelle,
  • Construire les activités du projet autour de l’accompagnement de la réflexion des jeunes sur leurs comportements et au renforcement de certaines compétences psycho-sociales (résistance à la pression, esprit critique, choix raisonné, etc.),
  • Montrer l’effet nocif du tabac en s’appuyant sur la mesure de la perte du goût liée à la consommation de tabac,
  • Accompagner les jeunes tout au long de leurs années de collège.
  • Evaluer les impacts du programme sur le retard à l’entrée dans la consommation et sur le taux consommation en fin de collège.

 Calendrier

Principaux acteurs et partenaires

Principaux éléments saillants

Un protocole d’essai randomisé

La principale caractéristique du projet PEPITES est le plan expérimental basé sur un essai randomisé en cluster selon l’organisation suivante :

La randomisation « en cluster = par collège)a été effectuée car il était difficile, pour des raisons éthiques, de proposer à seulement une partie des élèves d’un même collège (voir d’une mêle classe) de participer à des ateliers, et pas aux autres.  De plus, le groupe contrôle aurait pu être influencé par le groupe « activité » et les résultats auraient été probablement biaisés.

Ce protocole de recherche a été validé par le Comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé, la CNIL[3] et par le Comité d’évaluation éthique de l’Inserm.

Afin de collecter les données nécessaires à l’étude, la Fondation JDB a :

  • adressé un courrier aux parents, précisant les principaux points de la démarche, afin de recueillir leur consentement à la participation de leur enfant à cet essai randomisé. Les collégiens pouvaient également renoncer à participer au projet, même si leurs parents avaient donné leur accord formel. En tout, 74 refus ont été enregistrés.
  • mis en place des questionnaires (testés préalablement auprès de différentes classes non incluses dans ce projet) à destination des élèves participants, à remplir :
    • au début de chaque année scolaire, et en fin de 5ième et en fin de 3ième[4] afin de collecter des données sur :
      • les caractéristiques personnelles et familiales, en lien avec les déterminants de l’expérimentation ou de la consommation régulière de tabac (consommation dans leur famille, connaissances et croyances sur le tabac, etc.) ainsi que leurs intentions vis  à vis de la consommation de tabac.
      • leur comportement face au tabac : expérimentation, consommation régulière, ex-fumeur, non-fumeur, etc.
    • après chaque atelier pour évaluer les acquisitions liées aux ateliers et sur ce qui a plu et fonctionné dans l’animation, etc.
  • adressé des questionnaires pour collecter l’avis des enseignants et autres professionnels de l’éducation nationale sur la démarche.

Les questionnaires anonymisés étaient remplis par les élèves via des tablettes mobiles. Les élèves étaient informés de cette anonymisation des données recueillies (usage de codes générés aléatoirement et attribués à chaque élève). Les élèves avaient le droit de refuser de remplir les questionnaires. (L’usage des tablettes apportaient un côté ludique à l’exercice, par rapport au papier.)

Les ateliers sur de la mesure du goût[5] proposés en 4ème et 3ème , étaient réalisés à l’aide d’un électrogustomètre, (mesure des potentiels électriques du goût au niveau de la langue[6]). Ils avaient  pour but de  démontrer la perte de goût dès que la consommation de cigarette est régulière. Cette manipulation s’est appuyée sur le travail de recherche de Fabrice Chéruel, tabacologue et enseignant à l’université Paris Saclay.

« L’hypothèse était de faire prendre conscience aux collégiens que dès la première cigarette ou la première chicha voir du premier joint de cannabis, il se passe une détérioration au niveau des cellules du goût situées sur la langue et ainsi d’avoir un impact sur les premières expérimentations. »

Stéphanie Vieira, Chargée de mission à la Fondation JDB

Un partenariat resserré avec l’éducation nationale

Isabelle Prieur, Conseillère technique auprès du Directeur académique de l’Essonne, a joué un rôle clé dans ce projet en facilitant les liens entre la Fondation JDB, la Direction académique et les établissements. La Fondation JDB commençait à l’époque à être connue sur le territoire mais PEPITES était son premier projet de grande ampleur. Mme Prieur a pu rapidement présenter la démarche et la faire valider au niveau du département, ce qui a grandement facilité sa mise en œuvre.

Le département de l’Essonne est précurseur dans la mise en place des Comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté[7] ; l’adhésion de la Direction académique au projet s’est inscrite en continuité de cet engagement. Le sérieux de la démarche et la présence d’acteurs universitaires dans l’équipe de la Fondation JDB ont été des arguments facilitant également cet accord, selon Mme Prieur.

Une sélection des établissements partenaires par l’éducation nationale

Des critères avaient été définis en amont par la Fondation JDB pour la sélection des établissements participants, en lien avec les caractéristiques socio-démographiques des collégiens accueillis et les types de collèges. Cependant, Mme Prieur a recouru à des critères « éducation nationale » pour proposer les 6 établissements, c’est-à-dire des critères de faisabilité : chefs d’établissements pouvant être partie prenante, dynamique existante autour de l’éducation pour la santé, présence d’infirmières scolaires sensibles au projet, climat au sein des établissements, proximité des locaux de la Fondation JDB, etc.

Mme Prieur avait préalablement mis en place avec ses collègues infirmières scolaires un répertoire des actions d’éducation pour la santé dans les établissements du territoire. Elle a pu s’appuyer sur ce répertoire pour identifier les collèges engagés sur la santé. Elle souhaitait de plus que les collèges appartiennent à des bassins différents et qu’ils ne soient pas tous en réseau d’éducation prioritaire. Elle a appelé chaque établissement envisagé pour s’assurer que les infirmières scolaires seraient bien parties prenantes. Ensuite, la Direction Education des services départementaux de l’éducation nationale de l’Essonne (DSDEN91) a adressé un courrier aux 6 chefs d’établissements pour les inviter à contribuer au projet. Tous ont accepté.

Un moment clé : la réunion de lancement du projet

En juin 2014, une réunion avec les représentants des 6 établissements sélectionnés a été organisée pour présenter le projet et organiser un tirage au sort afin de désigner quel établissement allait rejoindre quel groupe de l’essai (avec ateliers ou témoins).

Les collèges impliqués dans la démarche ont été les suivants : Collège le Village à Evry, Collège Pierre Mendès France à Marcoussis, Collège Jean Moulin à la Norville, Collège Charles Péguy à Palaiseau, Collège Gérard Philipe à Massy, Collège Roland Garros à St Germain-Lès-Arpajon.

A la rentrée 2014 des rencontres avec chaque établissement ont ensuite permis de clarifier les attentes et les besoins de la Fondation JDB pour la mise en œuvre des ateliers et le remplissage des questionnaires, d’identifier les acteurs référents des établissements (infirmière scolaire et/ou conseiller principal d’éducation) et de répondre à toutes les questions des équipes des collèges.

Ensuite, avec les référents de chaque collège, les plannings des ateliers ont été construits. Si la première année, les ateliers étaient fixés « au fil de l’eau », il a ensuite été décidé de tous les programmer dès la rentrée, ce qui a grandement facilité leur intégration dans le programme des élèves.

Un cycle de 8 ateliers, deux par année de collège

Chaque élève inclus a ainsi bénéficié de deux ateliers par an pendant ses quatre années de collèges. Les contenus des ateliers étaient adaptés selon l’âge des élèves et s’intéressaient aux questions et thématiques suivantes :

Chaque session, d’une durée de 45 minutes, s’appuyait sur des échanges, la réponse aux nombreuses questions (sur la cigarette électronique qui s’est développée en France sur cette période par exemple), des contenus interactifs (jeux de rôles) et sur le développement des compétences psychosociales des jeunes. La salle était aménagée avec les chaises en arc de cercle pour encourager les échanges et, selon Stéphanie Vieira, « mieux se voir, mieux parler, mieux jouer ». La thématique de la chicha aurait pu être plus abordée.

Pour chaque session, une fiche pédagogique a été élaborée par la Fondation JDB et contient : les objectifs, un descriptif de l’atelier, les modalités d’évaluation, les suites de l’atelier un déroulé détaillé et une bibliographie.

La majorité des sessions a été animée par Stéphanie Vieira. Fabrice Chéruel est lui intervenu sur les sessions incluant la mesure du goût.

« J’étais appelée « Madame Tabac », quand les collégiens me croisaient dans les couloirs : « Ah, y a Madame Tabac qui est là ! » Comme quoi ça marque ! »

Stéphanie Vieira, Chargée de mission à la Fondation JDB

Un professeur était systématiquement présent pendant les ateliers, mais ne participait pas. Il gérait l’appel, et la discipline si nécessaire. Il est possible que cela ait freiné la libre expression des jeunes pendant les ateliers, mais ce n’est pas le ressenti de l’équipe. Selon les plannings, les ateliers pouvaient être organisés sur les temps de différents cours (français, maths, SVT, EPS, etc.).

Principaux enseignements

Résultats observés

Un impact du programme sur les consommations de tabac des jeunes

L’analyse des résultats de l’essai randomisé, en tenant compte des perdus de vue (33% des effectifs en fin de projet) et des différentes variables liées au tabagisme (sexe, composition de la cellule familiale, activité sportive, zone d’habitation, fumeurs dans l’entourage, etc.) montre que « les ateliers pédagogiques ont permis de réduire significativement l’accroissement du nombre d’expérimentateurs de cigarettes de 10% (de 44% à 34%) entre la 6ème et la 3ème (p=0.03) et le nombre de fumeurs réguliers de cigarettes en fin de collège de 3 à 2% (p=0.07) ».[8]

Certains éléments de bilan ont par ailleurs pu être partagés en fin de 3ème avec des élèves de deux des établissements participant au projet, en fin de démarche. Cela a représenté un moment important pour ces élèves qui ont pu comprendre tout le sens du programme PEPITES dans lequel ils ont été engagés pendant 4 années.

Des enseignements sur la posture et les pratiques d’animation

Ce projet a été riche en enseignement sur les modalités d’animation des groupes de collégiens, tels que :

  • Disposer de connaissances afin de répondre précisément aux différentes interrogations,
  • Travailler la posture de l’intervenant : ne pas être moralisateur, ni porter de jugements, distribuer au maximum la parole, répondre aux interrogations tout en restant neutre, etc.,
  • Adapter le discours en fonction de l’âge des participants,
  • Utiliser des jeux, rendre les activités très interactives,
  • Être dans l’échange, le débat, sortir du format classique de salle de cours,
  • Aborder les stratégies marketing employées par les industriels du tabac pour donner les moyens aux jeunes de décrypter les messages qu’ils reçoivent.

La théorie du comportement planifié [Azjen, 1991] vise à expliquer ou infléchir les comportements à partir de questions comme le lien avec les attitudes, le sentiment d’auto-efficacité et les normes sociales. Comme l’indique la Fondation JDB sur son site internet, « cette théorie a montré son efficacité pour prédire l’intention et le comportement tabagique en agissant sur les attitudes vis-à-vis du tabac, les normes sociales et le contrôle comportemental ». C’est notamment en s’appuyant sur cette théorie que la Fondation JDB a mis en œuvre le Programme P2P2 de prévention du tabagisme par les pairs en lycée professionnel en région Ile-de-France (2018-020).  

La construction des activités basée sur les théories du comportement planifié et sur le développement des compétences psychosociales des jeunes a permis de travailler avec eux sur les représentations, les normes sociales, l’influence des amis, etc., et de voir ensemble comment il est possible de résister, de donner son opinion, de se construire ses convictions, etc.

Un autre intérêt du programme est lié à la mesure du goût. Cette activité a été jugée très intéressante par les élèves et les enseignants (notamment de SVT), par son côté pratique, interactif, lié au quotidien (échanges concrets autour du réflexe de nombreux fumeurs de manger plus salé ou épicé pour mieux sentir le gout des choses, etc.) et qui montre un impact concret et direct de la consommation de tabac sur la santé.

 

Une limite au protocole : la présélection des établissements

L’équipe de la Fondation JDB aurait souhaité que les 6 établissements soient tirés au hasard dans le département. Cependant, comme indiqué, les établissements participants ont été présélectionnés par l’éducation nationale, pour des raisons de faisabilité. Cela représente un problème pour l’extrapolation des résultats, mais pas aux conclusions sur l’effet des interventions.

Le principe de tirage au sort pour la répartition des collèges dans les groupes avec activité ou témoin a convaincre de la pertinence de cette méthode et de proposer d’autres activités non liées au tabagisme, aux collèges du groupe témoin, en réponse à la déception des partenaires.

Le projet a été par ailleurs difficile à mettre en œuvre dans un des établissements retenus, en lien avec de grandes difficultés internes à ce collège (absence de direction pendant plusieurs mois notamment), une infirmière scolaire nouvelle dans l’établissement et un climat très tendu.

« Tous les chefs d’établissement devaient nous accueillir pour mettre en place PEPITES, sauf pour un établissement, et ceci a eu des répercussions pendant toute la durée de l’étude, (pas de salle disponible, élèves absents ou occupés par d’autres actions, professeurs pas au courant… et certains ateliers non réalisés au final […] et c’est vrai que ça nous mettait en difficulté. »

Stéphanie Vieira, Chargée de mission à la Fondation JDB

Dans un but de transférabilité, cette expérience permet d’identifier diverses modalités utiles pour la mise en œuvre d’un tel essai randomisé dans d’autres collèges :

  • Présenter et expliquer très précisément le protocole de recherche aux acteurs concernés, afin d’éviter les difficultés fonctionnelles pour réaliser les ateliers dans les conditions prévues ;
  • Anticiper la façon de préserver l’absence d’actions « tabac » spécifique tout en conservant la participation du groupe témoin. Proposer d’autres activités, expliquant que c’est grâce à eux qu’il sera possible d’établir des résultats valables et exportables.
  • Prendre le temps, au départ, puis régulièrement, en réponse au fort turn over des professeurs, de réunir le corps enseignant de chaque collège pour expliquer le projet et sa dimension scientifique – ne pas s’appuyer uniquement sur la communication réalisée en interne par les chefs d’établissements, qui va fortement varier d’un établissement à l’autre.

Il a été envisagé de poursuivre l’accompagnement de ces mêmes jeunes au lycée. Cette option a cependant été mise de côté devant la complexité d’un tel suivi ; les collégiens étant, après la 3ième, dispersés dans de trop nombreux lycées différents.

Des effets sur les professionnels de l’éducation nationale

Le projet a pu avoir également des effets sur certains professionnels de l’éducation nationale impliqués, telles que les infirmières scolaires.

« Ce projet a pu montrer aux infirmières que c’est possible de travailler avec les professeurs en complémentarité. Il ne faut pas qu’elles craignent d’être force de proposition. J’ai encore des collègues qui ne sont pas très à l’aise avec les interventions collectives qui demandent des compétences vraiment différentes… de gestion du groupe et d’approche pédagogique.

Isabelle Prieur, Conseillère technique auprès du Directeur académique de l’Essonne

La nécessité d’une forte présence dans les établissements

Un des challenges du projet était lié à l’activité de remplissage des questionnaires par les élèves, en raison, au départ, de soupçons liés à l’anonymisation des données : ces craintes se sont dissipées avec le temps et, notamment en l’absence de conséquences en lien avec leurs déclarations quant à leurs consommations.

Des difficultés pour des raisons logistiques multiples :

A chaque fois il fallait trouver la salle, réunir le matériel, renseigner dans la base le bon hyperlien pour accéder aux questionnaires, accompagner les élèves dans leurs questions liées à la saisie, gérer les absents (organisation de sessions de rattrapages deux semaines après), etc.

L’équipe de la Fondation JDB pensait a priori que les professionnels des collèges allaient pouvoir être autonomes sur l’organisation de la saisie des questionnaires ; elle a dû en fait être présente à chaque fois.

« Le fait que l’équipe JDB prenne en charge de bout en bout le programme gratuitement, et qu’il y ait un élément local facilitateur (tel que une infirmière…) identifié pour aider, accompagner, soutenir, répondre à toutes les question et, être présent tout au long du programme permet la réussite.  En milieu scolaire, la réalisation d’une action « hors programme » est basée sur une proposition clé en main et gratuite. »

Stéphanie Vieira, Chargée de mission à la Fondation JDB

Quelques points clés ont été identifiés pour garantir la meilleure relation possible avec les collèges :

  • être à l’écoute de la communauté éducative et proposer un projet qui s’adapte au mieux au contexte et aux contraintes de chaque établissement, notamment en ce qui concerne l’emploi du temps,
  • planifier les activités le plus en amont possible (dès la rentrée),
  • maintenir un contact régulier avec les référents et les enseignants de chaque établissement, pour s’assurer du bon fonctionnement et répondre à leurs questions : en particulier, toujours rendre une visite lorsqu’on se présente dans l’établissement, afin de permettre des échanges en face à face,
  • Proposer des temps de bilan (deux fois par an dans chaque établissement) avec la présentation d’éléments chiffrés, des échanges sur les points d’amélioration et le recueil des retours,
  • S’assurer que le référent peut répondre aux questions d’organisation, sache faire un planning, ait en particulier accès aux plannings des jeunes, peut faire le lien avec les professeurs… Le profil, entre infirmière scolaire ou CPE, n’est, selon l’équipe de la Fondation JDB, pas fondamental. C’est bien la capacité de la personne de remplir les missions listées précédemment qui fait la différence.

Des évolutions sur la façon de travailler à la Fondation JDB

Ce projet a également été très riche d’enseignements pour la Fondation JDB. C’était en effet la première fois qu’elle menait un projet de cette ampleur dans des établissements de l’éducation nationale. Ainsi, plusieurs éléments clés ont pu être identifiés, en synthèse, grâce à cette expérience :

  • L’intérêt majeur du lien avec la DSDEN91, dans un premier temps, pour « ouvrir les portes des établissements »,
  • La nécessité d’ancrer le projet sur des fondements théoriques scientifiques dès le départ : avec PEPITES, l’ancrage théorique s’est enrichi au fur et à mesure du projet,
  • L’importance de s’appuyer sur les référents et de les accompagner, car ils jouent un rôle central sur le bon déroulement du projet,
  • La qualité de la mise en place de la démarche dans chaque établissement et l’organisation de temps de bilan réguliers, pour informer régulièrement les équipes concernées de l’avancée des résultats, sont des facteurs d’adhésion forts des professionnels de l’éducation nationale.

[1] http://www.fondationjdb.org/

[2]https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2016/sante-des-collegiens-en-france-nouvelles-donnees-de-l-enquete-hbsc-2014

[3] https://www.recherchecliniquepariscentre.fr/wp-content/uploads/2012/01/du-cp_cnil_20111123_SHN.pdf

[4] Pour les collèges du groupe témoin, les questionnaires étaient remplis en début d’année et en fin de 5ième et 3ième

[5] http://www.fondationjdb.org/fr/missions/methodes-et-outils-pedagogiques/17/57/actu-70/

[6] https://www.maad-digital.fr/articles/fumer-change-le-gout

[7] https://eduscol.education.fr/2277/le-comite-d-education-la-sante-et-la-citoyennete-cesc

[8] Vieira, S., Lambert, C., Chéruel, F., Pereira, B. & Sancho-Garnier, H. (2022). Un essai d’intervention randomisé efficace en prévention de l’initiation au tabac chez les collégiens en Essonne. Santé Publique, 34 https://doi.org/10.3917/spub.220.0007b